Voilà, c'est fait. J'ai enfin vu le
Dune
de
Denis Villeneuve, l'adaptation tant attendue de l'oeuvre de
Frank Herbert, du moins de la première partie puisqu'on aura très
certainement droit à une suite.
Dans ce premier volet, on suit l'histoire de Paul Atréides jusqu'au
moment où, avec sa mère, il rejoint les Fremens après l'attaque
dévastatrice des Harkonnen.
Difficile pour moi de faire une critique vraiment objective de ce film tant
l'attente était longue et les espérances plus grandes encore. Fan de
Dune depuis longtemps, ayant vu le film de
David Lynch de très
nombreuses fois, écouté la BO de
Toto
en boucle et lu une partie de l'oeuvre écrite (il faudra que je pense à relire
tout ça d'ici la sortie du second volet), j'ai dû faire un effort conscient
pour tenter de vous partager à la fois mon ressenti et malgré tout les
quelques défauts du film, selon moi.
Je savais que j'allais adorer ce film avant même de m'asseoir dans la salle.
Les bandes annonces et le teasing des derniers mois étaient tels qu'on savait
déjà que ce film allait être une véritable révélation esthétique, une claque
visuelle qui allait balayer les précédentes tentatives d'adaptation au cinéma
de cette oeuvre réputée impossible à adapter.
Et, pour moi, c'est clairement le cas; l'approche visuelle est grandiose. Les
paysages et décors naturels sont somptueux. L'esthétique des costumes, des
vaisseaux, des bâtiments laissent sans voix. La bande sonore est terriblement
efficace et immersive. L'histoire est strictement respectée, avec quand même
quelques choix douloureux comme la mise en avant de certains personnages,
Duncan Idaho et Gurney Halleck, au détriment d'autres; on voit
peu Thufir Hawat et Piter De Vries et on n'explique
pas du tout la place des mentats dans la société de Dune.
Pour rester sur les personnages, il faut souligner la prestation de
Rebecca Ferguson qui campe une Dame Jessica tiraillée entre son
devoir d'épouse, son amour maternelle et sa soumission à l'ordre
Bene Gesserit. C'est clairement pour moi le second rôle le plus
important du film et il va encore prendre de l'ampleur dans le second volet.
Sur le choix de Timothée Chalamet dans le rôle de Paul, je suis
plus mitigé; il est jeune, comme le Paul des livres. Il est à la fois
vulnérable et fort d'un enseignement et d'un entraînement qui l'aident à
surmonter les épreuves. C'est assurément un rôle compliqué car central dans la
saga. Tout tourne autour de lui, du personnage de Paul, qui est tour à tour
fragile, hésitant puis fort et déterminé l'instant d'après. Le choix
de Timothée Chalamet me laisse dubitatif mais en même temps je ne
vois pas quel autre acteur aurait pu faire le taf.
On voit aussi trop peu le Baron Vladimir Harkonnen mais ce qu'on en
voit est suffisant pour se faire une idée de la cruauté du personnage. Même
chose pour Rabban qu'on sent prêt à exploser. On sent la violence à
fleur de peau même si son temps d'image est très réduit.
Petit regret sur le peu de cas qui est fait du Docteur Yueh dont on
évoque à peine les motivations alors que son rôle est primordial.
Rôle honorablement tenu aussi par Oscar Isaac qui nous offre un Duc Leto Atréides tout en noblesse et en droiture. Pour les autres personnages, Stilgar et Chani, on les voit
tellement peu qu'il est difficile d'avoir un avis. J'attends le second volet
pour ça.
Donc un casting énorme, sans réel grand défaut si ce n'est un traitement
parfois inégal des personnages.
Le défaut principal du film, si on doit lui en trouver un, c'est la position
de spectateur qu'on garde tout au long du film. Généralement, quand je regarde
un film, j'arrive assez vite à m'identifier à certains personnages, à
ressentir de l'empathie pour eux. Ici, Villeneuse nous brosse un
tableau très complet et très compréhensible de Dune, et ça c'est déjà un sacré
défi, mais il reste, selon moi, sur une position de narrateur externe sans
jamais voir l'histoire par les yeux de Paul ou d'un autre personnage. Il y a
toujours cette distance, presque cette froideur ou cette neutralité par
rapport à l'intrigue. Même si on reste sans voix devant l'ampleur de l'oeuvre
et la beauté des images qui nous sont présentées, on ne s'imprègne pas
vraiment tout à fait de l'histoire, on ne ressent pas le désert et la chaleur
d'Arrakis, l'oppression des Harkonnen, les dilemmes de Paul ou
de Jessica, ou seulement à de courts instants. Si on devait trouver un défaut à ce film,
ça serait celui-là.
Autre petit défaut plus mineur: certaines transitions entre certaines scènes
sont parfois un peu brutales. On passe d'une scène dans le palais de
Caladan à une scène sur les falaises dans le cimetière familiale des Atréides trop
abruptement. Idem pour le voyage entre Caladan et Arrakis. On
aurait aimé un plan sur les vaisseaux de la Guilde Spatiale et une
explication sur leur rôle.
D'ailleurs certains aspects politiques du monde de Dune sont passés sous
silence: l'Empereur et sa fille Irulan, le Landsraad, la
Guilde Spatiale, la CHOM. On suppose, on espère que ces éléments seront
abordés plus explicitement dans la suite.
Après, Denis Villeneuve expliquait en interview avoir voulu faire un
film pour les fans mais aussi pour les personnes n'ayant aucune connaissance
de l'univers de Dune; là, le but est atteint. J'ai été voir le film
avec mes trois enfants qui n'avaient que peu de connaissances de l'univers du
film hormis ce que je leur en avait dit et ils ont beaucoup aimé. Ils
n'ont pas ressenti les manques et les petits défauts que j'ai mentionnés plus
haut pour la simple et bonne raison qu'ils n'avaient pas d'autres références.
Donc, clairement, pour moi, c'est la meilleure adaptation de Dune au
cinéma à ce jour. On a vraiment ici un chef d'oeuvre et une vraie nouvelle référence
visuelle pour cet univers. Mieux, quand on feuillette le jeu de rôle
Dune, on retrouve les visuels du film, pas les photos mais bien les concept
art, de vrais dessins. On a donc un tout cohérent entre film et jeu de rôle,
sans compter la BO qui est immersive et inspirante. L'ensemble forme un tout à exploiter en jeu autour d'une table, pour les
initiés comme pour les novices.
Mon avis final: un très très bon film, pas exempt de quelques défauts, mais
une belle réussite. J'attends la suite avec impatience. En attendant, je vais
revoir ce premier volet, c'est sûr.